Le narrateur est Caumes, un lycéen comme les autres. Entres potes, sorties, bac et petite-amie, sa vie lui plaît. Mais elle est bouleversée par les attentats de janvier 2015. Comme toutes les vies françaises. Caumes découvre alors l'horreur du monde dans lequel on vit, la cruauté de certains individus. Son quotidien ne sera plus jamais le même. Et la France ne sera plus jamais la même.

"En tout cas, je vois clair dans son regard et son regard, il dit : Je suis désolée, voilà le monde qui vous attend."

Si je n'ai pas immédiatement accroché à Caumes, j'ai forcément été touchée par ses interrogations et par la façon dont il vit les événements. Je me suis vue en lui. Comme lui, j'étais au lycée le jour des attentats de Charlie Hebdo. Comme lui, j'ai immédiatement compris que je n'aurai plus jamais la même vision du monde. Comme lui, j'ai échangé pendant de longues heures avec mes professeurs pour comprendre le sens de ces actes, si sens il peut y avoir. Cette sensation de vécu était extrêmement troublante. C'était difficile de me replonger dans ces événements et dans mes souvenirs. Caumes est très intelligent, il saisit rapidement tout ce que cette horreur entraîne. Il essaye de mettre des mots sur l'indicible, de comprendre comment il est censé vivre au milieu de ce monde qui l'effraie. Les autres personnages, Hakim, Théo, Esther, sont tout aussi touchants. Esther est une jeune femme que j'ai adorée. Elle est douce, intelligente et audacieuse. Sa relation avec Caumes est touchante, je me demande bien comment elle va évoluer.

Vous l'aurez compris, le décor de cette histoire fait froid dans le dos. Il nous confronte à des événements auxquels on préfèrerait penser le moins possible. Mais Arnaud Cathrine le pose avec brio. Ce n'est pas un roman qui a pour ambition de faire pleurer. Il cherche à montrer de quelle façon un événement peut bouleverser des millions de vies. Et parfois, les briser. C'est un roman qui fait évidemment réfléchir sur ces attentats, sur ceux qui ont lieu ensuite, sur la peur que l'on peut ressentir, sur la perte de croyance en le monde. Et sur bien d'autres choses encore. La plume de l'auteur est percutante, il ne cherche pas enjoliver les faits, que ce soit des choses banales du quotidien ou les attentats. Il y a parfois des tournures vulgaires qui m'ont dérangée, je n'aime vraiment pas lire des obscénités. La fin m'a énormément touchée : j'étais malheureuse pour Caumes, pour ma génération, pour ce qui attend les générations futures.

"Que nous apprend l'histoire ? […] Parfois l'histoire ne nous apprend rien et tout est à refaire."

J'ai aimé lire A la place du cœur, même si les souvenirs que le roman fait remonter et les interrogations qu'il met en avant m'ont bouleversée. C'est un beau livre qui montre le malaise dans lequel se trouve notre génération. Je lirai la suite dès que l'occasion se présentera !